After Eric: New American Composers After 1980 (Part Two)
Par Philip Copeland, chef de chœur et professeur
Voici le second article d’une série en deux parties sur les compositeurs américains nés après 1980. Pendant de nombreuses années, Eric Whitacre et Morten Lauridsen dominèrent le paysage de la composition chorale aux États Unis. Ces dernières années ont vu émerger d’autres compositeurs, dont les pensées et idées ont trouvé un point d’ancrage. Trois d’entre eux figuraient dans le premier article : Ted Hearne (né en 1982), Jake Runestad (né en 1986), et Nico Muhly (né en 1981).
Pour cet article, j’ai fait des recherches sur les directeurs de chorale sur ChoralNet, sur Facebook, auprès des éditeurs de musique et autres créateurs de musique. Mon objectif était de repérer de jeunes et excellents compositeurs; ce ne fut pas chose facile. Plusieurs amis ont contesté mon choix arbitraire de 1980 comme date de naissance; d’autres ont estimé que mon premier groupe de compositeurs n’était pas représentatif des femmes, et ne reconnaissait pas les compositeurs d’origines ethniques différentes. Beaucoup de compositeurs correspondaient à mon critère – né en 1980 ou après – mais je ne pouvais pas les inclure tous !
Finalement, j’en ai identifié quatre pour figurer dans cet article : Zachary Wadsworth (né en 1983), Michael Gilbertson (né en 1987), Dominick DiOrio (né en 1984), et Sydney Guillaume (né en 1982). Ils sont présentés ici sans aucune préséance particulière.
Zachary Wadsworth (né en 1983)
www.zacharywadsworth.com
Zachary Wadsworth est un compositeur original pour chœur et un nouveau membre du corps professoral du Williams College, un collège privé d’arts libéraux à Williamstown, au Massachusetts. Le compositeur James MacMillan fut le premier à attirer l’attention sur la musique chorale de Wadsworth grâce à son rôle d’Arbitre Final lors de la remise des Prix de Composition de la Bible du Roi Jacques (the King James Bible Composition Awards), concours qui a été créé à l’occasion du 400ème anniversaire de la Bible du Roi Jacques. Cet évènement attira une attention importante sur la musique de Wadsworth, qui a finalement eu pour résultat une commande de la part du magazine “Choir & Organ” et une relation suivie avec l’éditeur Novello. La composition gagnante de Wadworth, Out of the south cometh the whirlwind, a été décrite comme “un apport hautement imaginatif et nécessaire au répertoire pour chœur et orgue, qui constituerait un hymne particulièrement dramatique et saisissant lors des Vêpres“.
Wadsworth mentionne Arvo Pärt et Luciano Berio comme ayant eu une importante influence sur son style choral mais nomme son professeur Steven Stucky comme étant celui dont l’influence sur sa musique chorale est la plus grande. En particulier, il admire la capacité de Stucky à apporter la même élégance et le même génie technique à sa musique chorale qu’à ses œuvres de chambre et orchestrales.
Pour Wadsworth, “les meilleurs œuvres chorales ressemblent à de petits univers ordonnés, dans lesquels texte et musique soutiennent un message central, aux résonances émouvantes“. Dans la création de ces mondes sonores, il utilise souvent des modes de composition et des formes des siècles passés.
Son dialecte compositionnel et son langage harmonique, toutefois, sont totalement modernes.
Deux de ses œuvres, Beati Quorum Remissae (Alliance Music Publishing AMP0729) et Spring is Here, (disponible sur le site web du compositeur) témoignent des prouesses de composition de Wadsworth et de cette alliance entre l’ancien et le moderne.
Dans Beati, Wadsworth se sert à la fois du texte et de la musique comme support émotionnel central du message de pénitence et de pardon. Le compositeur y retravaille l’ordre des vers du Psaume 32. Plutôt que de commencer avec des vers de prière, comme l’a écrit le psalmiste, Wadsworth débute avec une complainte et va graduellement vers une délivrance. Pour y parvenir, le compositeur utilise un second petit chœur offrant l’espoir et l’encouragement au chœur plus important qui chante le désespoir.
Cette œuvre pour double chœur ressemble à l’Hymn to the Virgin de Benjamin Britten, où le second petit chœur chante seulement en latin. Cependant, l’utilisation par Britten du chœur double ne devait servir qu’à fournir le commentaire au texte anglais. Wadsworth utilise le texte latin du second chœur pour influer sur la voix parlante du premier chœur : il fonctionne un peu comme une aide dramatique pour stimuler l’espoir.
Par des quartes justes et des dissonances occasionnelles Wadsworth saisit le sentiment plaintif du psaume. Les deux techniques sont efficaces, à la fois en matière de sentiment général et de figuralisme spécifique; elles suggèrent clairement aussi l’influence d’Arvo Pärt : voir m. 1-5 (exemple 1).
Exemple 1, “Beati Quorum Remissae,” m. 1-5.
Le compositeur illustre à la perfection le point culminant de l’œuvre, en utilisant toute la gamme du potentiel sonore du chœur pour illustrer le texte “cris de délivrance“, que voici en exemple 2.
Exemple 2, “Beati Quorum Remissae,” m. 47-49.
Dans son “Spring is Here“ (Le printemps est là), Wadsworth fait de nouveau se rejoindre l’ancien et le moderne. Dans sa composition, il emploie la forme du madrigal de la Renaissance pour introduire un texte de Duncan Campbell Scott (1864-1957), d’ailleurs intitulé “Madrigal“. Dans cette œuvre, le compositeur fait appel à de nombreuses caractéristiques traditionnelles du madrigal dans cette réincarnation du XXIème siècle, telles que la forme strophique, le figuralisme, les syllabes saugrenues, un texte joyeux, la mise en place d’un texte syllabique et une tonalité essentiellement majeure.
Le compositeur amène facilement au XXIème siècle la forme compositionnelle de la Renaissance. Les quatre premières mesures représentent la diversité des procédés de compositions utilisés pour introduire le poème de Scott : une mélodie en mouvement discontinu, un mélange de mesures avec aussi des changements de pulsation. Bien que complexe, l’écriture est très claire ; les harmonies verticales se déploient logiquement de la mélodie qui s’élève au texte qui tombe naturellement sur le rythme proposé (Exemple 3)
Exemple 3, “Spring is Here,” m. 1-4.
Dans cette composition, la technique longtemps chérie du figuralisme fait de fréquentes apparitions, en particulier par l’utilisation du portamento sur les mots “drowsy town” (ville endormie), suivis par ce qui semble être un carillon sonnant l’heure; le voici en exemple 4:
Exemple 4, “spring is here,” m. 38-40.
L’œuvre est régulièrement ponctuée par des versions modernes de syllabes saugrenues fournies par le poète, technique récurrente qui renforce le lien à la forme madrigal de la Renaissance tout en procurant à l’œuvre son unité (Exemple 5).
Exemple 5, “spring is here,” m. 49-52.
Ces syllabes saugrenues permettent au madrigal d’atteindre son apogée avec conviction et intensité (Exemple 6).
Exemple 6, “spring is here,” m. 99-101.
La musique de Zachary Wadsworth reflète son niveau élevé de compétence en matière de composition et son œuvre croissant couvre une palette émotionnelle de plus en plus vaste. Le site web de Wadsworth, comme sa musique, est professionnel et facile d’accès : il y a beaucoup à explorer et à découvrir. Sur sa page web, ses compositions chorales sont réparties par niveau de compétence et il y fait la distinction entre le sacré et le profane. Les chefs de chœur d’ensembles avant-gardistes pourront y découvrir, outre les œuvres présentées dans cet article, son To the roaring wind, une œuvre profondément contemporaine qui exploite le poème éponyme de Wallace Stevens. Les musiciens d’église seront intéressés par son arrangement de l’hymne “Immortal Love, forever full” à la mélodie “Calgary.
© Zachary Wadsworth. Tous droits réservés.
Michael Gilbertson (né en 1987)
www.michaelgilbertson.net
Bien qu’il n’ait pas encore trente ans, Michael Gilbertson est un compositeur de Dubuque, dans l’Iowa, très joué et à la carrière brillante. Il est actif dans un certain nombre de genres musicaux dont d’importantes œuvres pour le ballet, l’opéra, des ensembles à vent et pour orchestre. Gilbertson est un compositeur extrêmement bien formé, avec un impressionnant pédigrée de maîtres. C’est un compositeur prodige : sa ville d’origine a joué ses œuvres depuis qu’il a 15 ans !
Le très talentueux Gilbertson n’est pas un compositeur de chorale prolifique, mais il semble prêt à développer ce genre musical. Il collabore fréquemment avec Kai Hoffman-Krull et a produit deux œuvres chorales : Where the Words Go et Returning. Gilbertson cherche à travailler avec des œuvres préexistantes et des compositeurs du passé, comme dans son réarrangement des trois textes qui furent à l’origine exploités par John Dowland. Cet ensemble, appelé “Three Madrigals After Dowland” (Trois Madrigaux d’après Dowland), présente trois textes: Weep You No More, Burst Forth, My Tears et Come, Heavy Sleep.
Gilbertson semble préférer une déclamation austère du texte; beaucoup de ses musiques chorales commencent par une quinte creuse (Exemple 7 et 8)
Example 7, “Come, Heavy Sleep,” m. 1-4.
Example 8, “Where the Words Go,” m. 1-5.
“Burst Forth, My Tears” de Gilbertson est une œuvre plus rythmique que les deux autres madrigaux. Dans cette composition, le compositeur propose un rythme conducteur dans le chœur et l’associe aux envolées des sopranos solistes. Il apporte aux déclamations de texte par les solistes une magnifique dissonance, qui aborde le texte généralement à partir de la consonance d’un intervalle (Exemple 9 et 10).
Exemple 9, “Burst Forth, My Tears,” m. 5-7.
Exemple 10, “Burst Forth, My Tears,” m. 8-10.
Récemment, Gilbertson a achevé une œuvre plus importante pour chœur double qui fut présentée en avant-première par Musica Sacra (Musique Sacrée) à la Cathédrale St John The Divine (St Jean le Divin) à New York. Cette œuvre a été désignée par beaucoup comme son “meilleur morceau”, et son œuvre chorale la plus conséquente à ce jour. Cette œuvre de vingt minutes illustre, une fois encore, les textes d’Hoffman-Krull, dans une découverte de l’amour, du regret et du souvenir, par le biais d’une conversation entre les personnages bibliques David et Jonathan.
L’œuvre du compositeur est fréquemment jouée par des orchestres de chambre professionnels, dont des représentations par The Crossing (Donald Nally), et The Esoterics (Eric Banks) sont programmées pour la fin de cette année.
© Michael Gilbertson. Tous droits réservés.
Dominick DiOrio (né en 1984)
www.dominickdiorio.com
Ces temps-ci, Dominick DiOrio est partout et dans tout ce qui a trait à la musique chorale. Son influence revêt beaucoup de formes : compositeur, lobbyiste, chef de chœur et présentateur. Il est d’abord et avant tout compositeur, et il a dernièrement été primé comme “gagnant 2014 du Prix Américain de Composition” (The American Prize in Composition) où il a reçu des éloges pour “la profondeur de sa vision, la maîtrise de sa technique de composition et son style unique qui le placent dans une catégorie à lui seul“.
Une partie du style unique de DiOrio est la philosophie de la virtuosité qu’il utilise dans ses compositions, une approche qui s’extériorise de nombreuses manières. Souvent, la technique fait son apparition dans les instruments accompagnateurs, mais elle peut aussi se manifester dans les voix solistes qui accompagnent le chœur, ou dans les parties chorales elles-mêmes. Pour DiOrio, “la virtuosité est l’élément clé, car il suppose que le chœur avec qui il travaille soit fondamentalement un ensemble vocal de musiciens qualifiés. Bien sûr, des ensembles amateurs peuvent chanter cette musique aussi (et le font) mais elle exige le meilleur de leurs capacités vocales en ce qui concerne la mesure, le ton, la justesse, l’endurance vocale et le registre dynamique“.
Le compositeur a écrit un vaste œuvre pour chœur, y compris pour grand ensemble, orchestre de chambre, chorale a cappella, des œuvres pour instrument soliste accompagné et pour clavier seul. Deux de ses œuvres sont présentées ici : O Virtus Sapientiae (2013), a cappella avec trois sopranos solistes, et Alleluia (2013), pour chœur et marimba.
C’est comme percussionniste qu’il a d’abord été formé: il n’est donc pas surprenant qu’il trouve excitante la complexité rythmique. Selon ses mots, “il veut créer dans la plupart de ses œuvres une notion élastique du rythme, utilisant toutes les combinaisons internes du tempo (duolets, triolets, divisions en 4, 5, 6 et 7), des temps souvent travaillant ensemble dans un contexte d’accélération et de décélération (2, 3, 4, 5) “. Cet aperçu de la complexité, ainsi que son intérêt à écrire pour percussion et chœur virtuose, apparaît dans son Alléluia.
Le chœur au complet entame l’œuvre avec des énonciations audacieuses en fortissimo, suivies d’un accompagnement au marimba mené à un tempo rapide (Exemple 11).
Exemple 11, “Alleluia,” m. 8-12.
Le rythme ralentit quelque peu dans le milieu du morceau, mais la complexité rythmique reste présente dans les voix bien que sous une forme plus subtile (Exemple 12).
Exemple 12, “Alléluia,” m. 53-58.
L’écriture propose à la fois un marimba moteur et une complexité rythmique vers la fin de l’œuvre (Exemple 13).
Exemple 13, “Alléluia,” m. 83-88.
DiOrio est un tel défenseur de la musique chorale contemporaine qu’on pourrait rester surpris qu’il préfère chanter la musique du passé et des compositeurs comme Lassus, Bach et Mendelssohn. DiOrio croit que ces compositeurs du passé, maîtres du contrepoint, ont beaucoup à enseigner aux jeunes compositeurs d’aujourd’hui. Au lieu d’investir dans des leçons du passé, il pense que “la plupart des compositions d’aujourd’hui paraissent avoir été écrites par deux mains au clavier, plutôt que conçues pour être des lignes individuelles de chant“.
O Virtus Sapientiae est une œuvre qui tire notre attention vers la musique du passé: elle propose les chants d’Hildegard, un chœur SATB divisé et trois sopranos solos. La disposition scénique est importante dans cette œuvre : elle vise à représenter le drame des visions d’Hildegard. Les trois solistes sont placées aux coins Nord, Sud et Ouest de l’espace scénique, tandis que le plus grand chœur se tient à l’Est.
Au début de l’œuvre, les trois solistes sopranos chantent une version légèrement modifiée du chant original d’Hildegard en proposant le texte latin O Virtus Sapientiae. La présentation vocale de DiOrio augmente chaque fois en complexité: la deuxième entrée propose le chant original en canon à trois voix égales, tandis que la troisième présente le chant original accompagné de versions augmentées de ce même chant (Exemple 14). Les trois versions sont un excellent exemple de la créativité et de la fascination de DiOrio avec comme matériau une seule mélodie.
Exemple 14, “O Virtus Sapientiae,” m. 15-19.
Les chœurs divisés répondent à chaque version de chant par une traduction anglaise du texte latin, sur un accompagnement homophone ressemblant à l’orgue tout au long de la première moitié de l’œuvre.
Exemple 15, “O Virtus Sapientiae,” m. 21-25.
Dans la deuxième moitié de l’œuvre, les solistes et le chœur changent de langues et les trois solistes deviennent beaucoup plus virtuoses, en imitation quasiment scrupuleuse. A partir de cette imitation, DiOrio est capable de créer de tortueuses complexités rythmiques.
Exemple 16, “O Virtus Sapientiae,” m. 45-46.
Au paroxysme de la composition, les voix les plus graves du chœur reprennent à leur compte un peu de la virtuosité des parties antérieures des solistes, tandis que ces dernières s’orientent plutôt vers le rythme et l’homorythmie.
Exemple 17, “O Virtus Sapientiae,” m. 63-64.
Le compositeur DiOrio a plusieurs casquettes, mais son job principal est celui de Professeur de Musique Assistant à l’Ecole Jacobs de Musique de l’Université d’Indiana (the Jacobs School of Music of Indiana University). Outre son enseignement de la composition il dirige NOTUS, un ensemble consacré à la musique de compositeurs vivants. Ils interprètent des premières d’œuvres d’étudiants, de compositeurs émergents et de maîtres établis de la composition moderne. Parmi les plus jeunes compositeurs récemment présentés on trouve Jocelyn Hagen, Michael Gilbertson, Texu Kim, Tawnie Olson, Zachary Wadsworth et Caroline Shaw. Ce groupe a été récemment présenté comme ensemble résident pour “The Composers Track” au Congrès National de l’ACDA de 2014.
Par son action avec NOTUS, Dominick DiOrio semble devenir un personnage influent parmi les plus jeunes compositeurs américains. Lors du Congrès National de l’ACDA de 2014 mentionné plus haut, il présenta une communication intéressante intitulée “Trente et quelques : Nouvelle Musique Chorale par les Meilleurs Jeunes Compositeurs d’Aujourd’hui“.
Avec la permission de l’éditeur Scott Foss (sfoss@halleonard.com) Editor, Classical and Concert Choral Music, Hal Leonard Publishing, 769 Diana Dr., Verona WI 53593 (+1-608-2135577)
Sydney Guillaume (né en 1982)
www.sydneyguillaumemusic.com
Sydney Guillaume est originaire d’Haïti, et a émigré aux États-Unis dans sa jeunesse. Diplômé de l’Université de Miami, il vit à présent à Los Angeles, en Californie. Son style de composition est influencé par Haïti, et il utilise fréquemment des textes qui sont une combinaison de créole haïtien et de français. Guillaume est intimement lié aux textes qu’il choisit: la plupart d’entre eux sont des arrangements de la poésie de son père, Gabriel T. Guillaume.
Comme compositeur, Guillaume est bien connu du monde de la musique chorale américaine. Sa musique a été chantée par des chœurs universitaires comme l’University of Miami Frost Chorale ou le Westminster Chorus, et par des chœurs professionnels, tels que Seraphic Fire et le Nataniel Dett Chorale.
Le Westminster Chorus a récemment présenté “Gagòt” de Guillaume au Congrès ACDA de la Division Ouest. Composée pour chœur d’hommes (TTBB), l’œuvre présente le poème de Gabriel Guillaume: frustration difficile, confusion et rédemption. Il s’agit d’un texte puissant qui saisit bien la frustration de la vie de tous les jours, où “tout s’enchevêtre : peine et joie, doute et foi, aversion et espoir, bien et mal“.
Habilement, le compositeur Guillaume décrit la frustration pressante du texte par un arrangement en ré mineur avec un rythme changeant rapidement pour s’installer finalement en une longue série de mesures en 3/4. Même si cette mesure est familière, la disposition rythmique de Guillaume est à la fois intentionnellement perturbante et complètement fraîche. A cette instabilité, le compositeur ajoute une complexité occasionnelle au moyen de lignes rythmiques plus rapides et d’harmonies inattendues. Ces enchevêtrements sont savamment orchestrés: le compositeur permet à la musique de s’apaiser un bref moment avant de les amener (Exemple 18).
Exemple 18, “Gagòt,” m. 40-43.
Vers le milieu de “Gagòt“, Guillaume fournit la solution aux frustrations de la vie par un chœur splendide qui oppose au stress et à la tempête des premières mesures un calme réconfortant:
“La vie face à la mort est un combat de chaque instant, qui ne peut se gagner qu’un moment à la fois. Après la nuit vient le jour. Après la pluie, le soleil brille. Après les problèmes, après le désordre… le cœur s’apaise. C’est lutter en souffrant qui apporte la rédemption. Ah ! Qu’il en soit ainsi ! “.
Le “Gagòt” de Guillaume est une belle collaboration d’un père avec son fils, et aussi un superbe exemple de l’efficacité du figurisme en musique chorale. Guillaume, le compositeur, présente un texte similaire dans Tap-Tap, bien que ce poème en créole haïtien soit de Louis Marie Celestin.
Le Tap-Tap de Guillaume est une chaude pagaille de syncopes superposées ponctuées de lignes chromatiques descendantes, de doubles croches répétées et de gémissements de plaisir occasionnels. Le texte engageant du poème exhorte l’auditeur à se dépêcher de profiter de l’occasion de faire quelque chose pour la nation, de faire quelque chose pour la société.
Dans cette musique il y a une urgence : elle commence simplement, puis augmente en complexité à un rythme plutôt rapide. Bien que la plus grande partie de l’œuvre soit implacablement syncopée, il y a des moments occasionnels de déclamation homophone.
Exemple 19, “Tap-Tap,” m. 23-28.
La musique de Sydney Guillaume se caractérise par un haut degré de rythme, et son important œuvre est bien connu aux États-Unis. Ceux qui sont intéressés par l’œuvre présentée ici voudront aussi étudier Kalinda, publié par Walton Music, et Dominus Vobiscum, une autre œuvre issue de la collaboration père-fils commandée par Seraphic Fire et publiée elle aussi par Walton Music. Les deux, Gagòt et Tap-Tap, sont disponibles directement sur le site web du compositeur.
© Sydney Guillaume. Tous droits réservés.
Philip Copeland est directeur de Choral Activities (Activités chorales) et professeur agrégé de musique à la Samford University de Birmingham, Alabama. Ses chœurs sont de fréquents participants et lauréats des concours internationaux et des congrès de l’American Choral Directors Association (Association américaine des chefs de chœurs) ainsi que de la National Collegiate Choral Organization (Organisme choral collégial national). À Samford il enseigne la direction, la diction et l’éducation musicale. Le Dr Copeland est titulaire de diplômes en éducation musicale et direction de l’Université du Mississippi, du Mississippi College, et du Southern Seminar de Louisville, KY. À Birmingham, il dirige la musique à la South Highland Presbyterian Church (Église presbytérienne South Highland) et prépare l’Alabama Symphony Chorus (Chœur symphonique d’Alabama) à des représentations avec l’Alabama Symphony Orchestra (Orchestre symphonique d’Alabama). Il est le père de triplées de neuf ans : Catherine, Caroline et Claire. Courriel: philip.copeland@gmail.com
Traduit de l’anglais par Chantal Elysène-Six (France)