Diriger une œuvre musicale - Comme au théâtre (1ère partie)
Tim Sharp, chef de chœur, directeur exécutif de l’American Choral Directors Association
Quand on pense à une scène, qu’il s’agisse de théâtre, d’opéra ou de comédie musicale, certains éléments viennent à l’esprit. Acteurs, plateau, rideau, texte, mise en scène : autant de termes familiers du vocabulaire dramaturgique.
Plus précisément, si l’on pense à la scène d’un théâtre, on pense à l’orientation sur ce plateau: côté cour, côté jardin, l’avant-scène, le fond de scène. On pense aussi à des espaces hors-scène, comme les coulisses et la fosse d’orchestre. Et on pense encore que les acteurs évoluent devant un fond de scène, qu’ils utilisent et interprètent un texte, et présentent le résultat à un public.
Beaucoup de ces éléments concernent aussi le chef, qui travaille sur un plateau virtuel; la scène peut donc être un excellent cadre de référence pour étudier le langage gestuel de la direction musicale.
Voyons les outils gestuels dont dispose le chef : ses bras, ses mains, ses doigts, sa tête, son visage et, en fait, tout son corps “joue” avec les gestes de la battue et de la musicalité. Tout ce “jeu” a comme arrière-plan le torse du chef. De plus, ces éléments sont présentés sur une scène imaginaire, qu’on décrit de diverses façons: le plateau, le point d’impact, la pulsation, se réfèrent tous au plancher imaginaire qui sert de scène aux gestes du chef pendant son travail silencieux sur le texte musical de la partition.
Le corps du chef en tant que fond de scène, les acteurs que sont les bras, les mains, les doigts, la tête, le visage et le corps entier: les traits subtils de chacun de ces éléments, la manière dont il fonctionne et est perçu, ajoutent à la précision de la “pièce de théâtre” gestuelle. Comprendre ces règles et s’exercer pour acquérir une technique de direction bien précise amélioreront la communication non verbale, indispensable à un chef efficace.
Pour diriger avec précision, les acteurs corporels
Le bras, outil d’une direction précise, se divise entre le haut du bras, l’avant-bras, le coude, la main avec la paume et les doigts. Chaque segment a sa place dans le lexique du langage gestuel.
La tête du chef, en tant qu’outil gestuel, et les traits du visage commandent tous des mouvements d’interprétation théâtrale. Le front, les sourcils et, surtout, les yeux et la bouche sont de puissants outils dont dispose le chef efficace.
Le tronc du chef sert d’arrière-plan au jeu des acteurs, mais il pivote et s’ajuste aussi d’autres façons pour intensifier son message. Les épaules, l’attitude et la posture générale du chef, isolément et ensemble, reflètent une forme d’autorité et envoient d’importants signaux aux musiciens.
Les bras
Les bras sont les acteurs les plus visibles au théâtre de la direction musicale. À ce titre, ils jouent un rôle de premier plan dans l’art du chef : indiquer la mesure et le tempo. Beaucoup de grands musiciens (compositeurs, chefs et interprètes) ont souligné que si une œuvre musicale n’est pas jouée au bon tempo, rien ne sera bon. Si le chef ne donne pas le tempo correct, il n’y a pas d’autre référence que les musiciens puissent suivre.
Les chefs craignent qu’on réduise leur fonction au fait de battre la mesure, comme un métronome sur pied. Ce n’est pas nécessairement, pour les bras, un rôle péjoratif.
Toute la communication nécessaire à une direction efficace doit se situer dans le cadre de la mesure et du tempo. Seul le chef indique précisément les changements qui vont survenir d’une mesure à l’autre. Même si l’on présume que les musiciens comptent et écoutent pour prévoir leurs entrées, ils ne peuvent pas connaître la durée précise d’un allargando ou d’un point d’orgue. C’est le boulot du chef. Par conséquent, cette fonction d’indiquer la mesure et le tempo à l’aide des bras devrait être considérée comme un élément fondamental d’un langage gestuel précis.
Une fois établie la nécessité de cette fonction, il faut remarquer que les gestes du tempo et de la métrique ne sont pas nécessairement essentiels pour apprendre le répertoire de la direction. C’est pourquoi, en commençant à étudier les gestes des bras, on mettra de côté la mesure et le tempo pour chercher d’abord à comprendre le théâtre joué à l’aide des divers gestes de direction. Comme toutes les caractéristiques musicales essentielles à une direction efficace, la mesure et le tempo seront présentés au moment opportun.
Les mains
Si l’on considère les bras comme les “acteurs” les plus significatifs au théâtre de la direction musicale, les mains articulent le détail de la pièce de théâtre. Elles constituent le point précis où se concentre l’attention des choristes ou des musiciens. C’est avec les mains qu’on indique le détail d’une coupure, qu’on communique, dès la préparation initiale, les caractéristiques de l’œuvre à interpréter, et qu’on traduit en gestes les diverses nuances, tout au long de la prestation.
Un métronome est capable d’indiquer un tempo de base, mais rien ne peut remplacer le leadership musical qu’on peut exercer dans le domaine de l’interprétation. Les mains sont la clé de la subtilité nécessaire à cette gestique interprétative.
Comme les mains sont le prolongement des bras, elles contribueront naturellement à donner le tempo et la mesure. De même, les bras ne sont pas coupés de la fonction d’interprétation. Il en va de même du visage, des épaules et de tout le corps en arrière-plan. Tous ces acteurs agissent de façon coordonnée, pour réaliser la pièce de théâtre que sera la prestation.
Le corps, arrière-plan
Dans une vraie pièce de théâtre, l’action se déroule devant un arrière-plan qui aide à concentrer l’attention du public. Dans le cas de la direction musicale, cette fonction est assurée par la partie du corps allant des épaules à la taille. Cette section, le thorax, fournit l’environnement neutre qui permet de concentrer l’attention sur le jeu des bras et des mains, acteurs de la direction musicale.
La raison d’être de l’environnement neutre devant lequel les gestes sont “joués” est d’assurer la clarté de ce qui est communiqué par les mains et les bras. Le visage est inclus dans cet arrière-plan, et peut être employé de façon très efficace au théâtre du langage gestuel.
Pour reprendre l’analogie avec la scène, le jeu ne se déroule pas hors-scène, dans des espaces comme les coulisses ou la fosse d’orchestre. Pour plus de concentration et d’efficacité, il se déroule sur scène. En fait, des termes comme “côté cour” et “côté jardin” renvoient à des endroits précis sur la scène où se déroule l’action. Ces endroits bien circonscrits sont employés pour maximiser l’efficacité d’une œuvre théâtrale.
L’analogie de la scène est utile si on veut diriger avec précision: pour une efficacité visuelle maximale, le théâtre de la direction gestuelle est joué sur scène. Les gestes qui ne bénéficient pas de l’arrière-plan du corps perdent de leur précision pour les choristes ou musiciens.
Au sens le plus large, une direction forte et efficace se produit devant l’arrière-plan d’un thorax neutre. Une direction faible et peu efficace se produit hors de ce plan visuel. Les chefs qui reconnaissent l’efficacité d’une direction centrée et pratiquent une telle direction sont les chefs les plus précis.
Le bas du corps
Le théâtre de la direction gestuelle se joue sur scène, pas sous la scène. Pour une raison d’ordre très pratique – l’action ne peut pas être observée si elle survient plus bas que la taille – les gestes de la direction sont exécutés à la taille et au-dessus. Cette ligne imaginaire représente le plateau, le plancher de la scène. Par convention, ce niveau de la scène est désigné comme le point d’impact, le plateau, le point de pulsation.
Évidemment, le bas du corps fournit un soutien pour les bras, les mains, les épaules et le tout le corps comme arrière-plan. La position du dos, des épaules et de la tête, mais aussi le bas du corps constituent le support de la posture globale du chef. La position idéale pour le bas du corps est de placer un pied légèrement en avant de l’autre, comme pour marcher, le poids du corps étant réparti sur les deux jambes. Cette position est la plus confortable pour diriger, et c’est aussi une position plus agressive, exprimant l’autorité et le contrôle. Une telle posture accentue visuellement l’autorité du chef et son contrôle de l’ensemble musical en action. Par-dessus tout, trouvez équilibre, entrain et confort dans votre rôle de chef-meneur.
La tête et le visage
Bien que la tête n’ait pas d’arrière-plan, l’attention des musiciens ou choristes s’y concentre à cause des importants “acteurs” faciaux. En outre, vu que nous cherchons généralement le contact visuel quand nous communiquons par la parole, le visage est par nature un centre dramatique fort. À l’intérieur de cette zone, les yeux sont l’outil le plus efficace du langage corporel. On peut les employer pour soutenir des entrées, des préparations, et pour interpréter divers aspects de la musique. Leur emploi le plus efficace est peut-être de signaler les entrées à certains pupitres, ou à des solistes. La combinaison du contact visuel avec la section à faire entrer et d’un geste des bras et des mains est extrêmement efficace pour les entrées. Les yeux peuvent aussi affirmer qu’un signal particulier va être donné à tel soliste ou à tel pupitre.
Le visage peut renforcer les gestes des bras et des mains, ou il peut rester neutre. Il lui est même possible de diminuer l’effet du théâtre gestuel qui se déroule sur la “scène” du chef, devant son thorax-arrière-plan. Évitez de réagir négativement avec votre visage : une telle attitude peut préoccuper votre ensemble et détourner son attention.
Trois fonctions de la direction musicale
Les acteurs corporels employés pour diriger avec précision remplissent, de manière non verbale, les trois fonctions qu’on trouve dans la gestuelle de direction :
- La mesure et le tempo
- L’interprétation
- Les entrées et les arrêts.
Chaque fonction est d’une importance cruciale pour communiquer avec les instrumentistes et les chanteurs à l’aide de gestes de direction précis; chacune détermine le rôle des bras, principaux acteurs au théâtre de la direction, tout comme celui des mains et des autres acteurs corporels.
Alors que le stéréotype – et même la caricature – veut que le chef batte la mesure avec ses bras pour donner le tempo et la mesure, le véritable artiste se révèle par son aptitude particulière à traduire l’interprétation de la musique dans sa gestuelle.
La mesure et le tempo
Par définition, la musique est du son organisé dans le temps. Au fil des siècles la musique a évolué, mais elle a toujours reposé sur la mesure et le tempo inhérents à toute musique.
La musique ancienne était mesurée par la durée des notes en relation à des modes rythmiques. La pratique courante et la tradition orale, autant que les indications écrites sur la partition, contribuaient à déterminer le tempo; y ont aussi contribué les traités théoriques qui ont recensé les pratiques musicales à travers les âges.
À partir des XVIIe et XVIIIe siècles, on indique clairement la mesure et le tempo sur la partition. Cette pratique – l’emploi des barres de mesure pour organiser la partition – s’est maintenue pendant les périodes classique et romantique, puis pendant la plus grande partie du XXe siècle.
Traditionnellement, chaque mesure simple peut être qualifiée soit de binaire, soit de ternaire; et simples ou composées (on peut dériver les mesures composées des mesures simples en multipliant ces dernières par 3). Les indications de tempo et de mesure s’appliquent généralement à de longues sections ou à des mouvements d’une œuvre. Toutefois c’est l’essence même de la composition que d’employer la mesure et le tempo pour ajouter de la variété : des changements sont donc possibles à tout moment, et il faut toujours les anticiper. De plus, la musique du XXe siècle nous a apporté des mesures irrégulières, ainsi que la superposition de mesures différentes (ce qu’on appelle la polyrythmie).
Voici le classement des mesures:
- Mesures à deux temps
- Simples: 2/2, 2/4, 2/8
- Composées: 6/2, 6/4, 6/8
- Mesures à trois temps
- Simples: 3/2, 3/4, 3/8
- Composées: 9/2, 9/8
- Mesures à quatre temps
- Simples: 4/2, 4/4, 4/8
- Composées: 12/2, 12/4, 12/8
- Mesures irrégulières: celles qui ne peuvent pas se diviser également en groupes de 2 ou de 3. Par exemple : 5/4, 5/8 et 7/8. On traite normalement ces mesures comme des combinaisons de 2 et de 3. Par exemple : 5/4 = 2/4+3/4 ou 3/4+2/4; 7/8 = 2/8+3/8+2/8 ou 3/8+2/8+2/8, etc.
D’autres éléments ont un impact sur la mesure et le tempo : ceux qui suspendent le tempo dans une œuvre musicale, notamment le point d’orgue, le tenuto et l’allargando. La façon de traiter ces éléments relève de l’interprétation, mais la façon de les indiquer par le geste relève de la mesure et du tempo.
Le bras droit et le bras gauche
Par tradition, on emploie le bras droit pour indiquer le tempo et la mesure, ce qui laisse le bras gauche pour l’interprétation : phrasé, nuances, intensité.
Il ne s’agit pas de suggérer que les bras fonctionnent séparément l’un de l’autre. Le chef doit plutôt apprendre à coordonner toutes les fonctions de la direction entre ses bras, ses mains, ses doigts, sa tête, son visage et son corps. De plus, tous les aspects de l’interprétation doivent eux aussi être présents dans les gestes qui indiquent la mesure et le tempo. Par exemple, une battue à quatre temps est dirigée en staccato, legato, etc; les crescendo et les diminuendo sont indiqués par le plus ou moins d’ampleur des gestes de battue, tout comme par les gestes de l’autre bras.
L’interprétation
La musique est l’expression audible des émotions et pensées du compositeur, organisée en sons musicaux. Même si ces sons organisés sont incapables de transmettre une signification concrète, ils sont néanmoins expressifs. C’est la tâche d’un chef d’interpréter exactement les intentions musicales du compositeur et de les transmettre de son mieux à un auditoire. Ceci appelle le chef à tenter de pénétrer la pensée du compositeur, l’esprit du texte ou le message de la musique.
Cette tâche englobe chaque aspect de la partition : la mesure, le tempo, les nuances, le phrasé, le caractère, etc. Cela comprend tout : les solos comme les passages en tutti. Chaque dimension de la partition est soumise à l’examen et à l’interprétation du chef. Même si les difficultés de la mesure et du tempo ne sont pas minces, ce n’est rien en comparaison avec le défi présenté par les éléments affectifs des nuances, du phrasé et des autres aspects de l’interprétation.
Les indications sur la partition offrent une certaine aide au chef, mais elles sont parfois absentes; qui plus est, dans la musique, beaucoup n’est pas indiqué. C’est donc la tâche du chef d’interpréter l’information disponible et de l’employer en vue d’une prestation exacte. C’est une énorme tâche et une responsabilité de meneur.
L’interprétation inclut un ensemble de considérations musicales, comme l’illustre cette liste de quelques défis d’interprétation auxquels doit répondre le chef : forte, piano, mezzo piano, accelerando, sforzando, ritardando, legato, marcato, staccato, et tenuto. On notera que des termes relatifs à la mesure et au tempo comme accelerando et ritardando font partie de cette liste, puisqu’ils relèvent eux aussi de l’interprétation. Des termes comme fuoco, passione et giocoso font aussi appel à l’habileté du chef comme interprète.
En direction musicale, le bras gauche est chargé de l’interprétation. Cependant, le bras droit, le visage, les mains et tous les outils gestuels aident à refléter le caractère de la musique. Même les gestes indiquant la mesure et le tempo doivent participer à l’interprétation de la partition.
En général, l’interprétation est exprimée par des gestes plus ou moins liés ou détachés – molto legato, legato, marcato, accentué, staccato, par exemple. Ils se représentent par des mouvements horizontaux ou verticaux de la main disposés en cercles, en arcs, en angles et en arrêts, et relèvent du style de direction propre à un chef en particulier.
Les départs, entrées et les finales, silences: aperçu
Certains tiennent pour acquis le démarrage et l’arrêt d’un morceau de musique; mais aucun chef ne peut prendre à la légère ce rôle. Certes c’est un bref moment, mais un moment crucial. Même si la notation musicale semble indiquer clairement les entrées et les sorties, elles peuvent prêter à controverse. Les groupes participant à la prestation attendent du chef des entrées et des arrêts précis, et c’est son rôle d’y pourvoir pour l’ensemble.
Le geste de départ d’une œuvre musicale peut sembler simple : lever la main ou la baguette. Mais le geste de préparation doit bien établir des éléments d’interprétation comme la mesure, le tempo et le caractère de la toute première note. Ces questions doivent être bien claires dans l’esprit du chef avant qu’il signale la préparation de la première pulsation.
Une responsabilité analogue est celle de faire démarrer un soliste ou un pupitre à l’aide d’un geste d’entrée. Même les musiciens virtuoses comptent sur le chef pour confirmer leurs entrées, parce que cela aide à garantir une prestation précise et inspirée.
Terminer l’exécution d’une œuvre musicale peut sembler aussi facile que de cesser tout geste de direction; mais à défaut d’un geste indiquant clairement à tout l’ensemble le moment où on veut conclure, il n’y aura pas de finale précise. Il en va de même pour tous les arrêts à l’intérieur de l’œuvre.
Les mains sont les outils les plus précis pour indiquer les départs et les entrées, les arrêts et les coupures, mais ces événements peuvent être annoncés par tous les outils gestuels dont le chef dispose. En particulier, les traits du visage peuvent être un grand appui et devraient être utilisés à dessein pour renforcer les gestes des mains.
Tim Sharp est directeur exécutif de l’American Choral Directors Association. M. Sharp met en œuvre un audacieux programme d’initiatives novatrices pour maintenir le dynamisme et la pertinence de l’ACDA au XXIe siècle, en incitant les membres de l’ACDA à chercher l’excellence dans l’exécution, la composition, l’enseignement et la promotion de la musique chorale. Tim en est à sa cinquième année comme directeur artistique du Tulsa Oratorio Chorus à Tulsa (Oklahoma). Précédemment, Sharp a été Doyen des Beaux-Arts au Rhodes College de Memphis, où il dirigeait les Rhodes Singers et la Master Singers Chorale. Auparavant, il a été directeur des activités chorales à l’Université Belmont, où il dirigeait la Belmont Chorale et l’Oratorio Chorus. On doit notamment à M. Sharp des ouvrages sur le mentorat (Mentoring in the Ensemble Arts), sur la direction chorale (Precision Conducting : Achieving Choral Blend and Balance) et sur les origines de la musique populaire au Tennessee (Memphis Music Before the Blues, Nashville Music Before Country), de nombreuses contributions à des ouvrages collectifs et autres articles. Diplômé de la Belmont University, Tim a obtenu une maîtrise et un doctorat à l’École de musique d’église de Louisville (Kentucky). Ses activités post-doctorales l’ont mené à l’Aspen Music School à Aspen (Colorado), en Études médiévales à la Harvard University (Boston, au Massachusetts); en Belgique à titre de boursier Rotary et au collège Clare Hall de l’université de Cambridge.
Courriel: sharp@acda.org
Traduit de l’anglais par Christine Dumas (Canada)