In Memoriam Willi Gohl 1925-2010

Jutta Tagger,

ancienne rédactrice en chef de l’ICB

 

Avec Willi Gohl le monde a perdu un musicien et pédagogue qui a marqué plusieurs générations de musiciens, d’abord dans son pays, la Suisse, et par la suite dans toute l’Europe et le monde entier.

Willi Gohl a consacré toute sa vie à la musique et à son enseignement. Son plus grand amour était la musique chorale, mais il a été aussi un excellent pianiste : en tant que claveciniste, il a accompagné les Kammermusiker Zürich dans le monde entier. Le plus connu de ses chœurs était le Singkreis Zürich, qu’il a dirigé pendant plus de 40 ans et avec lequel il a voyagé partout dans le monde.  Willi Gohl a été directeur du conservatoire de Winterthur pendant 27 ans. Pendant toute sa carrière il a organisé et dirigé des classes de direction, des ateliers de musique à l’école et des ateliers de musique chorale, en Suisse et à l’étranger.

Dès la création de la fédération en 1960 à Genève, Willi Gohl a travaillé avec Europa Cantat (fondée légalement en 1963 sous le nom de Fédération européenne de jeunes chorales – FEJC).  Dans ses festivals et semaines chantantes il a dirigé de nombreux ateliers de préparation de grandes œuvres chorales. Cependant, c’est sa manière unique de diriger le Chant commun – pour lequel il a aussi compilé des livrets de chants – qui restera dans toutes les mémoires. Dans ce même esprit il a aussi œuvré pendant plus de 20 ans pour le festival Zimriya en Israël ; et il a souvent participé aux Choralies d’A Cœur Joie. Entre 1965 et 1991 il a été membre du Comité Directeur d’Europa Cantat (avec quelques interruptions), et de 1978 à 1982 de celui de l’ISME (Société internationale pour l’éducation musicale).

Il aimait les grandes œuvres chorales et les oratorios, certes, mais il aimait tout autant les simples chants folkloriques ; il en a fait de nombreux arrangements pour chœur. Ses propres compositions chorales sont également du type folklorique, et quelques-unes parmi celles-ci font maintenant partie intégrante de la tradition folklorique suisse. Plusieurs générations d’élèves suisses ont appris à chanter avec ses livrets et feuilles de chant. Ses sessions de chant commun à la radio sont devenues légendaires. Sa très belle collection de chansons folkloriques, publiée en 1965 chez Diogenes sous le titre de « Das Große Liederbuch », avec de magnifiques illustrations de Tomi Ungerer, l’ont fait connaître parmi tous les Germanophones.

Tout ce qui rapprochait les hommes était capital pour Willi Gohl, et la musique chorale était un outil précieux pour favoriser ce rapprochement. Ainsi a-t-il participé avec sa chorale dès 1972 au Festival choral international du Lincoln Center à New York, organisé par Robert Shaw et Jim Bjorge sous la devise de la paix et du rapprochement des peuples. (Ce festival a eu lieu cinq fois en tout et s’est même déplacé jusqu’à Yale et le Kennedy Center à Washington, D.C.).

Ce festival a peut-être contribué à son fort engagement pour la création d’une organisation chorale internationale, laquelle fut finalement fondée en 1982 à Namur (Belgique) sous le nom de Fédération internationale pour la musique chorale – FIMC, dont, du coup, il a tout de suite été élu membre du Conseil (il en a fait partie jusqu’à 1996).

Les idées pédagogiques de Willi Gohl se sont également traduites dans le format élaboré par un groupe de travail préparatoire (dont il fut membre) pour le Premier symposium mondial de musique chorale en 1987 à Vienne (Autriche), format comprenant ateliers, master classes pour chefs de chœur – dans de nombreux pays il n’y avait pas de formation pour chefs de chœur, ce qui est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui – , la présence d’excellentes chorales amateurs du monde entier pour démontrer le niveau possible à atteindre etc. Ce format est par ailleurs toujours valable.

En 1996, Willi Gohl a présidé le jury du Prix de l’UNESCO pour la promotion des arts, qui fut attribué à l’unanimité au chœur Tapiola de Finlande sous la direction de Kari Ala-Pöllänen lors du 4° Symposium mondial à Sydney (Australie).

Willi Gohl fut aimé et admiré par tous. Il avait un don extraordinaire pour transmettre son amour de la musique. Son humanité, son humour et sa vivacité resteront dans les mémoires de tous ceux qui l’ont connu.

 

Willi Gohl conducting at the United Nations
Willi Gohl conducting at the United Nations

 

Il laisse sa femme Verena et ses cinq enfants, tous musiciens.

Un concert à sa mémoire aura lieu le 6 juin 2010 à Winterthur en Suisse.